Rapport de la mission Poigoune

Rapport de la mission Poigoune

11 mai 2010

Éducation et formation

Rapport de la mission Poigoune

Le 31 aout dernier, dans sa déclaration de politique générale, Philippe Gomes au nom du gouvernement, précisait que la création d’un statut de l’étudiant, recommandé notamment par le Conseil Economique et Social, semblait indispensable. A ce sujet, le gouvernement a confié une mission à Monsieur Elie Poigoune, ancien professeur des lycées, fondateur du Juvenat. « L’ensemble des problématiques qui se pose aux étudiants, précisait le président, devra être abordé : orientations, logements, transports, protection sociale, bourse, insertion… ». Après plus de 160 réunions et des mois de travail, Elie Poigoune a remis son rapport au gouvernement, en voici une synthèse.

" A la suite de la publication du rapport POIGOUNE, l'Université de la Nouvelle-Calédonie (UNC) a souhaité, par une lettre du 28 mai 2010, répondre point par point aux observations contenues dans ce rapport. Dans un souci de transparence et afin que chacun puisse se forger une opinion en toute objectivité, nous publions cette lettre du 28 mai 2010 et la réponse apportée à cette lettre par le Président du gouvernement le 18 juin 2010, ainsi qu'un document relatif à la réussite des étudiants produit par l'UNC ."

 

Synthèse du rapport

Pour son développement, ainsi que pour porter les responsabilités nouvelles découlant des transferts de compétences, la Nouvelle-Calédonie a besoin de cadres calédoniens bien formés, et en nombre suffisant. Or, on ne compte aujourd’hui que 6000 étudiants, sur place, en métropole ou à l’étranger, et on constate qu’ils ne bénéficient pas des meilleures conditions pour réussir dans leurs études et pour se préparer à occuper sur le territoire des postes à responsabilités. S’assurer de leur succès dans leur cursus, et augmenter leur nombre, sont donc deux enjeux essentiels pour l’avenir du pays.

 La mission a, ici et en métropole, rencontré de très nombreux acteurs – institutionnels, professionnels, enseignants, parents, étudiants. Après avoir entendu leur analyse des problèmes rencontrés par les étudiants calédoniens, dans leur vie quotidienne et dans leur scolarité, elle a formulé environ 150 préconisations, décrites sommairement ci-après, qui répondent à trois grands objectifs :

1.      Mieux valoriser les études supérieures et les étudiants au sein de la société calédonienne

2.      Assurer la meilleure adéquation possible entre les cursus suivis par les étudiants calédoniens, et les besoins futurs du territoire

3.      Accompagner l’étudiant vers la réussite, à tous les stades : orientation scolaire, préparation du cursus, vie de tous les jours, entrée dans la vie active et insertion dans la société calédonienne.

La mise en œuvre de ces préconisations fera appel à la mobilisation de tous : Etat, Nouvelle-Calédonie, provinces, établissements, enseignants, étudiants, etc.

La mission précise que certaines préconisations ont déjà fait l’objet de discussions avec les acteurs compétents. Certains ont indiqué qu’ils y donnaient suite. La mission a noté ces avancées et s’en félicite. Une volonté politique forte et concertée doit maintenant appuyer la concrétisation des propositions de ce rapport, pour une amélioration des conditions de réussite de nos étudiants. La mission préconise d’ailleurs la mise en place d’un comité de pilotage regroupant les différentes institutions et organismes concernés, chargé de suivre la mise en œuvre des actions préconisées.

Enfin, la mission s’est également penchée sur la situation des 900 apprentis que compte le territoire, et a rencontré ces apprentis. Il lui est apparu que leur situation présente de nombreuses similitudes avec celle des étudiants, tant en termes d’enjeux pour la société calédonienne qu’en ce qui concerne les conditions matérielles dans lesquelles ces jeunes effectuent leur période d’apprentissage. Plusieurs recommandations, formulées dans le rapport à destination des étudiants, leur sont donc également transposables.

1. Un enseignement supérieur plus visible et mieux valorisé

Assurer la promotion de l’enseignement supérieur est essentiel : des partenariats devront être mis en place entre les différents acteurs de la politique éducative de l’enseignement supérieur, dans le but de renforcer l’image de celui-ci, ainsi que l’image des établissements, auprès des futurs étudiants, des familles et du grand public. La mise en place d’un plan média est recommandée.

 Il faut également montrer la reconnaissance de la société envers les jeunes qui aboutissent dans leur cursus d’études, par exemple par la création d’un prix, d’une prime de mérite pour les étudiants non boursiers et non aidés ayant accompli en métropole ou en Europe un cursus méritant. 

L’enjeu de la revalorisation de l’image des études supérieures doit bénéficier à l’ensemble des cursus possibles : université, IUFM, IFM, EGC, ENEP, IFPSS, classes préparatoires aux grandes écoles, BTS, etc. 

Afin de replacer l’étudiant au cœur de la société calédonienne, il faudra le rendre plus visible au sein des différentes instances, par exemple par la création du conseil académique de vie lycéenne et du Conseil des Etudes et de la Vie Etudiante, et par sa représentation au conseil d’administration de la Maison de la Nouvelle-Calédonie, dans le cadre de sa mission de service Etudiant – Formation.

2. Une meilleure adéquation entre les cursus suivis par les étudiants calédoniens, et les besoins futurs du territoire

L’offre de formation doit être affinée, diversifiée, plus ouverte. On veillera à sa cohérence tant avec l’ensemble du système éducatif calédonien, qu’avec les réalités et les attentes de notre société, en réponse aux enjeux de développement du territoire. Il faut accroître notre partenariat dans notre espace géopolitique, favoriser les échanges. Il faut valoriser la formation professionnelle, soutenir la création d’une faculté des métiers sur Nouville. 

Les jeunes doivent être mieux informés sur les possibilités que leur offre l’enseignement supérieur. Il faut réorganiser l’accès à l’information vers l’orientation, par la mise en place d’une structure unique regroupant et restructurant les services proposés actuellement. Il faut mettre en place une politique d’orientation active, dès la seconde, puis tout au long de la scolarité de l’étudiant, afin que le jeune dispose d’une lisibilité suffisante sur le parcours dans lequel il s’engage et sur ses perspectives d’insertion professionnelle. 

La reconnaissance des diplômes nationaux et régionaux doit être élargie dans la fonction publique territoriale.

3. Un meilleur accompagnement des étudiants vers la réussite, dans leur cursus scolaire comme dans la vie de tous les jours

Pour accéder aux études supérieures, et les réussir, l’étudiant doit être accompagné, tant en préparation que pendant son parcours scolaire, dans sa vie de tous les jours, puis dans son insertion au sein de la société calédonienne. Lui offrir les conditions favorables à la réussite est un investissement nécessaire pour la société envers ces jeunes appelés à de lourdes responsabilités dans la construction du Pays.

 La mission recommande la mise en place, dans les filières sélectives, d’un quota de 30% de boursiers.

La mise en oeuvre d’un suivi pédagogique individualisé des étudiants apparaît comme un facteur de succès : remise à niveau, consolidation des connaissances prérequises, soutien scolaire, contrôle continu, appui aux choix des stages... Le suivi psychologique peut aussi être nécessaire et doit être proposé. La motivation de l’étudiant peut être renforcée par un engagement formel de sa part envers ses accompagnants. 

Pierre angulaire du dispositif, l’encadrement pédagogique doit être amélioré, par un investissement accru, sur le long terme et valorisant des équipes enseignantes. L’accès aux ressources pédagogiques doit être facilité. On devra en particulier analyser en profondeur les causes du taux d’échec élevé de l’Université de la Nouvelle-Calédonie.  

Les conditions matérielles sont un facteur déterminant de la réussite de l’étudiant. Financer ses études, pouvoir se loger, se déplacer, se soigner, se nourrir, avoir une vie sociale sont des droits les plus élémentaires. 

Le financement des études supérieures est assuré par les familles ou par des aides apportées par les différents programmes des Provinces ou du gouvernement. La mission recommande une harmonisation des aides financières, ainsi que l’étude de la création d’un GIP pour leur gestion. Des revenus complémentaires pouvant être nécessaires, il s’agira de favoriser les emplois réservés aux étudiants. 

Le logement représente un véritable souci pour les étudiants. Il faudra développer le parc immobilier accessible aux étudiants : construction d’une nouvelle tranche de logements sur Nouville et dans les lycées accueillant des étudiants, partenariat avec les opérateurs publics et privés gérant les parcs immobiliers à proximité des lieux de formation,... 

Le transport est également un problème majeur rencontré par les étudiants de Nouvelle-Calédonie. Il faudra revoir la desserte des lieux de formation, les horaires, les prix. La route d’accès au campus de Nouville doit être améliorée et sécurisée. Il faudra négocier des réductions sur les tarifs aériens internationaux et revoir les conditions d’attribution du passeport mobilité. 

La couverture santé doit être améliorée : accessibilité plus facile, confidentialité assurée pour les ayants droits des parents, mise en place du tiers payant, recalage du conventionnement CAFAT / sécurité sociale. Un effort particulier doit être mené sur la prévention, avec la mise en place d’un service de médecine préventive et de promotion de la santé à l’université de Nouvelle-Calédonie. 

Enfin, des tarifs préférentiels doivent être négociés pour offrir des réductions dans la restauration, les loisirs, le sport, la culture, etc. La mise en place d’une carte d’étudiant / apprenti offrira une lisibilité sur ce public. 

La mission insiste sur la nécessité de mettre en place un CLOUS en Nouvelle-Calédonie et demande que la question soit abordée lors du prochain Comité des Signataires. 

Les doctorants calédoniens relèvent de contrats disparates, et une harmonisation serait utile. L’amélioration des moyens matériels octroyés aux doctorants (notamment ceux en lettres sciences humaines) est recommandée par la mission. 

Les étudiants partant faire leurs études en métropole demandent une attention particulière. La création d’un guichet unique pour la préparation au départ, ouvert à tous, parents et jeunes, est proposée, ainsi que l’ouverture d’une représentation de la MNC sur Nouméa. L’accueil des primo arrivants en métropole doit être amélioré. La mission recommande que la Maison de la Nouvelle-Calédonie puisse jouer un rôle central d’accompagnement de tous les étudiants calédoniens vers la réussite, notamment par l’amélioration de l’accueil, l’animation d’un réseau d’associations régionales, la centralisation des bourses, l’assistance au logement, etc.