Frigodom n’a pas froid aux yeux

Depuis mi-novembre, Frigodom NC loue sa chambre froide géante aux entreprises qui n’en ont pas ou n’en veulent plus. « Elles peuvent ainsi se concentrer sur leur cœur de métier, la vente, sans avoir à investir dans une chambre froide en négatif, ce qui est hyper sécurisant. En fait, nous transformons leurs coûts fixes (achat, entretien, personnels…) en charges variables : le coût d’emplacement palette, de 190 F par jour de stockage, explique Bertrand Courte, gérant de la société. Cela peut générer pour elles des économies non négligeables ».

Dans la chambre froide –  une seule cellule –, la température oscille entre - 18 et - 20° C. Mieux vaut ne pas avoir oublié sa doudoune polaire au vestiaire. Deux évaporateurs se chargent des appoints de froid. La taille de la chambre (23 000 m³) et la mutualisation des moyens entraînent une diminution des coûts logistiques. « Aujourd’hui, nous sommes 30 à 40 % moins chers que ce qui se pratiquait jusque-là en Nouvelle-Calédonie, et deux fois moins chers en assurance », souligne Clément Chevry, directeur d’exploitation. Tout dépend aussi du produit entreposé. « Si vous stockez du foie gras, 190 F ce n’est pas cher, si vous stockez des glaçons, ce n’est plus pareil », sourit Bertrand Courte. Et Frigodom NC adapte ses tarifs à la quantité déposée. Pour les gros volumes, on passe à un tarif à la tonne.

Un inventaire personnalisé

Sitôt dépotée – généralement du vrac à la palette –, la marchandise est reconnue et Frigodom NC en devient financièrement responsable. Avec une surveillance H24 du système de réfrigération par gestion technique centralisée (GTC), et un système d’alerte froid en cas de pépin, l’entreprise offre ensuite à ses clients un suivi informatisé et, chaque jour, un inventaire personnalisé des stocks. « Des petits plus fort appréciés. » L’entreprise se targue également de proposer un service particulièrement réactif. « Il suffit de nous demander la veille. On prépare la commande, on la met sur le quai à 4 heures du matin, ou on la fait livrer. »  

Le projet, qui a mûri quatre ans, s’est concrétisé en douze mois de travaux. Coût de l’investissement, 1,6 milliard de francs, avec défiscalisation de Bercy – l’entreprise est reconnue comme un outil de lutte contre la vie chère – et financement des banques, BCI en très grande partie, et Société générale. Aujourd’hui, ce système de plate-forme frigorifique mutualisée a trouvé ses premiers clients : importateurs et distributeurs de denrées alimentaires essentiellement. « Il peut séduire également les producteurs, commerçants, le monde agricole, les pâtissiers, les pizzerias, tous ceux qui affichent des besoins de surgelés mais n’importent pas forcément eux-mêmes car ils n’ont pas la capacité de remplir un conteneur ou les moyens d’acheter une table froide », reprend le gérant.

« Une initiative courageuse »

Autre piste avancée par Arnaud Chevry, l’un des actionnaires, « une filière surgelé locale, avec atelier de découpe et stockage des produits qui n’ont pas pu être écoulés faute d’acheteurs suffisants à l’instant T, ce qui permettrait de produire davantage sans crainte de voir sa production pourrir ». Une suggestion accueillie favorablement par Nicolas Metzdorf, que les associés avaient convié pour une visite des installations : « Ça peut intéresser les agriculteurs pour les périodes de surproduction. Et leur éviter d’investir dans une chambre froide qui reste vide les trois quarts de l’année ». Pour lui, « cette initiative est courageuse, surtout qu’elle intervient dans une période compliquée ». Il poursuit : « Dans les projets qu’il soutient, le gouvernement subventionne énormément la partie froid. Une telle structure, destinée à aider les entreprises à stocker leurs productions en négatif, pourrait donc être intéressante pour nous ». Sans parler des milliers de tonnes de viande importées chaque année de Nouvelle-Zélande et qui pourraient être stockées sur la Zipad de Païta dans des conditions optimales de sécurité et de coûts.

En attendant, Frigodom NC enregistre l’arrivée d’un nouveau client, et pas des moindres, les magasins Corail. « On estime le taux de remplissage à 30 % d’ici à la fin 2019, indique Clément Chevry. Aux Antilles, au terme des deux premières années d’exploitation, les entrepôts étaient remplis à 60 % ».

Clément Chevry, directeur d’exploitation, et Bertrand Courte, gérant, à droite.

Nicolas Metzdorf en discussion avec Arnaud Chevry, l’un des actionnaires.

Les chiffres clés

- Chambre froide : 1 cellule de 2 300 m² x 10 m de hauteur

- Capacité de stockage : 5 500 palettes

- Sous la dalle : un réseau de 5 km de tuyaux d’eau chaude, pour prévenir les risques de fissures et d’affaissement de la dalle et du sol (il gèle)

- Tarifs : 190 F l’emplacement palette (1 m x 1,20 m x 1,80 m) par jour de stockage

- Nombre d’employés : 8

- Facture d’électricité : environ 3 millions de francs en décembre

- Investissement : 1,6 milliard de francs – 1,1 milliard en bâtiments, 200 millions en terrain et 300 millions en équipements

- Moyenne d’âge des actionnaires : 35,5 ans

Entre le conteneur et la chambre froide, une zone de dépotage/chargement en froid positif permet de garantir la fraîcheur de la marchandise.

 

Un réseau dans tout l’Outre-mer

Avec un actionnariat 100 % local – les frères Bertrand et Stéphane Courte et les frères Clément et Arnaud Chevry –, Frigodom Nouvelle-Calédonie est la dernière entreprise en date du Groupe Courte et Fils, spécialisé dans la gestion, le stockage et la sécurité : sociétés Promed, Locabox, Nouméa Archives, Sécu System, Vigifonds… Elle bénéficie de l’expertise et des conseils du réseau Frigodom (qui a conçu les plans du bâtiment de Païta), concept d’entreposage développé en Martinique en 2004 par Didier Mayenobe, et qui compte désormais 238 000 m³ de chambres froides : 43 000 m³ en Martinique (capacité triplée en quinze ans), 40 000 m³ en Guadeloupe, 16 000 m³ à Saint-Martin, 16 000 m³ en Guyane, 100 000 m³ à La Réunion et aujourd’hui 23 000 m³ en Nouvelle-Calédonie.