La Calédonie revisitée
Après le Vanuatu, le Mozambique, Madagascar, la Papouasie-Nouvelle-Guinée et la Guyane, la Nouvelle-Calédonie accueille « La Planète revisitée », programme d’exploration piloté par le Muséum national d’histoire naturelle. Premier volet, la campagne océanographique Kanacono, du 9 au 30 août autour de l’Île des Pins.
L’objectif de ce programme mené conjointement par le Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) et l’ONG Pro-Natura International (PNI) depuis 2006 consiste à acquérir de nouvelles connaissances sur la biodiversité terrestre et aquatique. « Avec ce programme, nous avons renoué avec la tradition des grandes expéditions scientifiques », indique Pascale Joannot, déléguée outre-mer et directrice adjointe des collections au MNHN.
En Nouvelle-Calédonie, les scientifiques vont se succéder durant deux années pour réaliser l’inventaire de la biodiversité « négligée », découvrir de nouvelles espèces sur tous les fronts (marins, terrestres et eaux douces), en particulier parmi les insectes, champignons, mousses, mollusques, crustacés et autres invertébrés marins, et ainsi faire progresser les connaissances.
À chaque expédition, les espèces découvertes se comptent par centaines. « Quand on connaît mieux, on gère mieux. C’est pourquoi les connaissances acquises pendant ces expéditions sont mises à disposition des gestionnaires publics, poursuit Pascale Joannot. “La Planète revisitée” comporte aussi un important volet pédagogique qui associe des étudiants et les écoles sur place ».
Prélèvement d’échantillons entre 100 et 1 000 m
Première des campagnes prévues en Calédonie, « Kanacono » a démarré ce mardi 9 août à l’Île des Pins. La mission doit permettre de mieux comprendre les écosystèmes profonds afin d’améliorer la caractérisation et la gestion concertée de ces milieux. Pendant deux semaines (troisième semaine prévue sur la ride de Norfolk), l’équipe scientifique – quatre Français dont le chef de mission Nicolas Puillandre, un Russe et un Taïwanais – naviguera en haute mer autour de Kunié à bord de l’Alis, navire mis à disposition par l’IRD, et prélèvera des espèces à l’aide d’une drague scientifique (pour laquelle une autorisation ponctuelle a été accordée par le gouvernement) entre 100 et 1 000 m de profondeur, une zone assez méconnue. Tous les jours, l’Alis rapportera les échantillons à terre à une autre équipe de sept personnes dont le chef de l’expédition Philippe Bouchet et deux étudiants de l’UNC.
De 7 à 10 millions d’espèces à découvrir !
Après un premier tri sur place, les échantillons seront envoyés en Métropole pour détecter les nouvelles espèces, lesquelles seront ensuite décrites par des spécialistes du monde entier. Chaque nouveau spécimen sera conservé au MNHN. À côté, le Muséum constituera pour le pays d’accueil une collection de référence des espèces découvertes. « Nous avons décrit environ 2 millions d’espèces sur la planète, il en reste de 7 à 10 millions à découvrir !, affirme Pascale Joannot. Financer de telles expéditions est une manière de valoriser un territoire à travers le prisme de la découverte. La Nouvelle-Calédonie est un archipel déjà bien connu, mais sa biodiversité est tellement riche que le travail ne sera jamais terminé ».
La suite du programme
Les restitutions publiques de la campagne Kanacono se tiendront le 21 août à l'Île des Pins, le 31 août à 17 h 30 au centre administratif de la province Sud et le 1er septembre à 11h à l'UNC (date à confirmer à l’IRD). En 2016, deux autres expéditions auront lieu : l’une terrestre, sur la Côte Oubliée, l’autre hydrobiologique à la Plaine des Lacs dans le Grand Sud. Pour 2017, des expéditions sont prévues dans la région de la Koné-Tiwaka et au large de Balabio en province Nord. Et, s’il reste des crédits, aux Chesterfield, puis aux Loyauté en 2018.
Alors que le MNHN a noué de nombreux partenariats locaux – province Sud, IAC, IRD, UNC, Ifremer, etc. –, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie finance cette opération à hauteur de 36 millions de francs. Il a autorisé le Muséum à mener la campagne Kanacono, sous les conditions suivantes : la présence d’un observateur des mammifères marins à bord de l’Alis pendant la période passée à l’intérieur du Parc de la mer de Corail, et la signature d’une convention MNHN-gouvernement encadrant la valorisation des données collectées. L’objectif étant de mettre des garde-fous pour que les collections ne s’égarent pas.