Un nouvel outil pour l'Ovalie
Ouvert en février 2019, le Centre de formation de la ligue calédonienne de rugby a été inauguré ce 28 juin au CISE de Koutio, devant de nombreux élus. Cet outil prépare la future élite du rugby local. Des athlètes programmés pour le Top 14, mais qui devront d’abord réussir leurs études.
Installé au CISE (Centre international sport et expertise) de Koutio, le centre de formation de la ligue de rugby de Nouvelle-Calédonie accueille 25 jeunes âgés de 18 à 21 ans – 22 garçons et 3 jeunes filles – dont beaucoup sortent du pôle espoirs. Des internes qui chacun suivent un parcours scolaire spécifique – BTS hôtellerie restauration ou transport et prestations logistiques, licence de lettres ou d’administration économique et sociale, cursus de terminale, formation d’apprenti plombier… –, se retrouvent le soir pour partir à l’entraînement sur les terrains du Pont-des-Français, et disputent le week-end un match de championnat avec leur club respectif : Petit Train de Païta, URC Dumbéa, Olympique, RC Mont-Dore, CREC Nouméa…
Entraînement dès 5 h du matin
Responsable du centre de formation, Raphaël Steyer est arrivé il y a cinq mois en provenance de Mont-de-Marsan. « Nos jeunes s’entraînent parfois dès 5 heures du matin !, témoigne-t-il avec respect. Si je demandais la même chose à des jeunes en Métropole, ils viendraient une fois mais pas deux ! Depuis février, aucun n’a abandonné, tout le monde a progressé. Il y a eu beaucoup de transpiration, mais personne n’a jamais renoncé, notamment grâce à l’état d’esprit inculqué par Paul Coffa (Ndlr : coach d’haltérophilie très connu dans la région) ». Raphaël insiste sur la priorité accordée aux études. « Notre objectif, c’est 100 % de réussite, mais pas en rugby, on sait pertinemment qu’ils ne rejoindront pas tous le Top 14 ou l’équipe de France. Le plus important est leur réussite professionnelle. Qu’ils aient un métier. Nous sommes là pour les accompagner, leur permettre de vivre à fond leur passion. Mais le jour où il y a un problème au niveau des notes, l’entraînement passe après ! »
Le bébé de Willy
Ce centre de formation est géré par l’Académie du Pacifique Sud, le “bébé” de Willy Taofifenua, celui dont rêvait ce Calédonien d’origine wallisienne, 3e ligne aile de Grenoble de 1992 à 2001, depuis qu’il quitta le Caillou il y a trente ans. À force de persévérance, son rêve est devenu réalité. « J’ai rencontré beaucoup d’échecs et de malheurs en France, des jeunes rugbymen partis trop tôt de Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna, mais aussi des Samoa, Tonga, Fidji. Ici, nous voulons faire en sorte que nos jeunes réussissent au niveau scolaire avant de tenter l’aventure en France, et éviter ainsi les départs précipités », indique Willy, aujourd’hui président de l’académie.
Le maillon manquant
Confirmation de l’ancien ailier international Patrice Lagisquet, coach de France Classic : « En France, ce n’est jamais facile pour des joueurs du Pacifique déracinés, l’environnement n’est pas toujours adapté. Cette académie va permettre à des jeunes à fort potentiel de trouver leur place et de se faire un beau parcours dans le milieu professionnel ». Pour le président de la ligue de rugby de Nouvelle-Calédonie, Marc Barré, le centre de formation était « le maillon qui manquait afin de garder les jeunes le plus longtemps possible sur le territoire et leur offrir une formation à la fois professionnelle et rugbystique de nature à rivaliser avec les meilleurs en Métropole ». Prochaine étape, la labellisation de l’outil par la Fédération française de rugby (FFR). Demande en cours d’agrément.
Un tournoi pour financer l’académie
Association loi 1901, l’Académie du Pacifique Sud est la suite logique du pôle espoirs (16-18 ans) de rugby, ouvert en février 2017 au sein du lycée du Grand Nouméa. « En mettant un coup de projecteur sur le rugby et sur la Nouvelle-Calédonie, la Classic Rugby Cup sert de support de promotion de l’académie, explique Hervé Mazzocco, ancien 3e ligne de Clermont et président de la société Orion Sport qui joue le rôle de facilitateur en contribuant au financement de l’association. Pendant cinq années, tous les bénéfices engendrés par le tournoi lui seront reversés. L’année dernière, nous n’avions pas tout à fait atteint le seuil d’équilibre. J’espère que cette année nous y parviendrons. L’idée est d’amener des entreprises à s’investir progressivement dans notre discipline et à s’impliquer dans un nouveau business model ». De son côté, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie finance lui aussi indirectement l’Académie du Pacifique Sud, en ayant donné 8 millions de francs en 2018 pour la première édition de la Classic Rugby Cup, et autant cette année.
Un CISE très accueillant
Établissement sous tutelle du CTOS (Comité territorial olympique et sportif), le CISE remplit une mission de séjour pour tous les jeunes sportifs de l’Intérieur et des Îles. Il accueille aussi des structures de haut niveau comme le pôle espoirs de handball féminin, l’académie de football féminin… ou dernièrement le pôle France handisport qui a demandé son rattachement, autant d’athlètes se préparant ici à des échéances nationales et internationales. Le CISE reçoit également à la carte des sportifs de la zone Pacifique, à l’image de ceux regroupés ici avant les championnats du monde juniors d’haltérophilie début juin à Fidji. Beaucoup de jeunes se succèdent donc à Koutio. « Il va falloir agrandir les murs du CISE, lance en souriant Georges Naturel, maire de Dumbéa. On a besoin d’encadrer notre jeunesse, en particulier dans le sport, pour qu’elle soit suffisamment armée face à la difficulté de l’éloignement et d’une pratique sportive exigeante ».
Victoire de la France
Surprise au stade Numa-Daly, la France a remporté la Classic Rugby Cup 2019 en battant la Nouvelle-Zélande (20-19). Coachés par Patrice Lagisquet, les partenaires de Jocelino Suta étaient au préalable difficilement venus à bout de l’Australie, alors que les Blacks s’étaient débarrassés sans trop de mal de Fidji. Arbitrée par une femme, Catherine Devillers, la finale de cette deuxième édition réservée aux “vétérans” de plus de 33 ans n’aura pas toujours été une partie… de plaisir, un bon paquet de baffes, contestations, bagarres et autres expulsions l’ayant émaillée de manière plutôt soutenue.