La lutte contre l’insécurité routière s’intensifie
Organisé conjointement par le gouvernement et le haut-commissariat de la République en Nouvelle-Calédonie, le forum 2023 de la sécurité routière s’est tenu à Boulouparis les 30 et 31 octobre. Tous les partenaires institutionnels, associatifs et professionnels impliqués dans la lutte contre l’insécurité routière étaient réunis pour conforter les axes de la feuille de route validée par le conseil calédonien de la sécurité routière en décembre 2022.
Si le nombre d’accidents corporels sur les routes, toutes gravités confondues, a diminué de plus de moitié (715 en 2005 contre 251 en 2022), le nombre de tués affiche, quant à lui, un taux tristement stable et même en hausse en 2022, avec 70 décès recensés. Un chiffre qui n’avait pas été atteint depuis le dramatique bilan de 2004 avec 83 tués. C’est avant tout « un problème de comportement » selon Gilbert Tyuienon. Les facteurs aggravants des accidents mortels demeurent la consommation d’alcool, de cannabis, la vitesse excessive ou non adaptée, le non-port de la ceinture de sécurité et le défaut de permis de conduire.
Le président du gouvernement a déclaré que « ce forum se donne comme objectif d’aller plus loin dans ce que nous avons déjà réalisé ». Au cœur des travaux de ces deux jours, étaient abordés la prévention, la répression, la réglementation et le financement de la sécurité routière.
Prévention : un réseau au plus proche du citoyen
Parmi les pistes de réflexion en matière de prévention, l’instauration d’un réseau de sentinelles a été évoquée. Les stations-service pourraient servir de relai en permettant une couverture territoriale. Afin de sensibiliser un public le plus large possible, en commençant par les enfants, il a été proposé de soutenir l’organisation d’actions au niveau communal et de constituer un conseil permanent de la sécurité routière junior. L’inauguration de la piste d’éducation routière à Boulouparis, en ouverture du forum est un exemple d’action menée à l’échelle des villes.
D’autre part, les réseaux de proximité tels que les paroisses et les autorités coutumières pourraient s’avérer être un relai efficace dans la diffusion des messages de prévention routière auprès de leurs communautés respectives.
Faire évoluer la réglementation pour une action efficace
Côté technique, la mise en place d’un contrôle technique périodique permettrait de disposer de chiffres fiables sur l’état des véhicules en Nouvelle-Calédonie. D’autre part, l’ensemble des participants s’est accordé sur la nécessité d’harmoniser ces contrôles techniques sur l’ensemble du territoire avec l’obligation de réparation sur les organes de sécurité majeur. Une mesure qui demanderait un accompagnement des consommateurs ainsi qu’un encadrement de la vente de pièces détachées.
D’autre part, la réglementation des équipements des véhicules (éclairages, bull bar…) et des infrastructures devraient évoluer (mise en cohérence des limitations de vitesse avec la catégorie des routes, etc.).
« Resserrer les mailles du filet de la répression »
Le président du gouvernement a annoncé une intensification de la répression. « Il va falloir sévir pour rebondir sur des bases nouvelles et notamment sur la responsabilisation des conducteurs », a-t-il souligné.
Parmi les pistes soulevées, le fait de renforcer la présence de radars a été proposé. Louis Le Franc, haut-commissaire de la République a annoncé pour 2024, l’installation de quatre radars chantiers.
Le déploiement des procès-verbaux électroniques destinés à rendre les contrôles plus efficients et efficaces, l’extension des pouvoirs de la police municipale ou encore la nécessité d’accélérer le délai de réponse judiciaire suite à une infraction ont été évoqués.
Autre solution du volet répression, la possibilité de lever les freins à l’immobilisation et à la saisie des véhicules de conducteurs en infraction. La création de nouvelles fourrières sera indispensable pour la mise en place de cette mesure.
Par ailleurs, il est apparu que la communication joue un rôle majeur dans ce volet répressif. C’est pourquoi il a été proposé d’intensifier la médiatisation des actions de contrôle, notamment via les réseaux sociaux. Les participants de l’atelier ont convenu de la nécessité de donner du sens à l’action répressive, afin de faire évoluer la perception sur les contrôles routiers. Le développement du travail d’intérêt général (TIG) routier mis en place depuis un an par le service pénitentiaire d'insertion et de probation (SPIP) fait partie de cet axe de travail.
Enfin, la lutte contre la consommation d’alcool et de cannabis demeure un enjeu majeur dans la sécurisation des routes calédoniennes. Plusieurs propositions ont été faites en ce sens, telles que l’institutionnalisation d’un suivi psychologique pour les personnes condamnées afin d’éviter la récidive, l’acquisition du matériel nécessaire au dépistage salivaire locale des stupéfiants ou encore la mise en place d’une amende administrative en complément de la suspension de permis de conduire pour les récidivistes. Pour Gilbert Tyuienon, « les valeurs de respect, de courtoisie et de responsabilité doivent être la base pour tous les conducteurs de Nouvelle-Calédonie. C’est le message qu’on souhaite transmettre à l’issue de ce forum ».
Des moyens accrus
Afin de financer l’ensemble des mesures préconisées, plusieurs actions ont été envisagées. Les recettes des amendes des infractions routières dont le recouvrement représente actuellement une difficulté doivent être fléchées pour la sécurité routière. De plus, une partie de la taxe sur les assurances automobiles pourraient également être reversée à la politique de sécurité routière. « L’autre piste est de rafraîchir la vignette automobile, pour que les recettes de cette redevance soient orientées vers la politique d’infrastructure routière pour les collectivités » a précisé Gilbert Tyuienon à ce sujet.
Ce forum de la sécurité routière s’inscrit dans la dynamique multi partenariale relancée en 2022. Dans la continuité de plusieurs autres actions thématiques de proximité menées en 2023 comme l’opération carton jaune ou encore la semaine de la sécurité routière au travail, ces temps forts ont vocation à être pérennisés sur d’autres communes de l’ensemble du territoire.
Pour le forum annuel de la sécurité routière, le totem a été transmis en clôture de l’événement 2023 au maire de Bourail qui accueillera la manifestation en 2024. Comme cette édition, il sera accompagné de son « village » destiné à la sensibilisation auprès du public et notamment des scolaires.
Le conseil calédonien de la sécurité routière
Le conseil calédonien de la sécurité routière (anciennement conseil permanent de la sécurité routière - CPSR), est chargé de déterminer les orientations stratégiques de la politique de lutte contre l’insécurité routière. Il est composé du président du gouvernement, du haut-commissaire, du membre du gouvernement en charge du secteur, du procureur de la République, du président du Congrès, du commandant de la gendarmerie de Nouvelle-Calédonie, du directeur territorial de la police nationale et du directeur de la DITTT.
Un comité de suivi réunissant les partenaires et acteurs de la sécurité routière, a vocation à échanger et à formuler des propositions d’actions concrètes afin d’infléchir la mortalité sur les routes de Nouvelle-Calédonie. Y sont représentés les associations (prévention routière, UFC-Que Choisir, le Forum des motards), les maires, les autorités coutumières, les institutions ainsi que les experts métiers (auto-écoles, expertise véhicules, etc.).
Des groupes de travail issus de ce comité technique et organisés en grandes thématiques, ont la responsabilité de définir les paramètres de faisabilité des solutions suggérées. Ils sont constitués d’un référent et de contributeurs en fonction des besoins techniques ou administratifs des problématiques traitées.