Artistes au plus près des patients
Les artistes intervenant au Médipôle ont été invités à se retrouver, à la direction de la Culture et de la condition féminine (DCCFC), pour partager leurs expériences et réfléchir sur leurs rencontres. Une démarche essentielle pour proposer des prestations de qualité auprès des patients au sein de l'hôpital.
Ils sont musiciens, conteurs, chanteurs ou encore clowns. Ils ont enlevé leur nez rouge et laissé de côté leur instrument pour rencontrer ceux, qui comme eux, ont décidé de mettre leur art au profit de la thérapie. Une idée de Liliane Tauru, chargée du dispositif « Empreintes - Arts & culture », initié et soutenu par le gouvernement de Nouvelle-Calédonie, accueillie avec enthousiasme par la dizaine d’artistes présents. « Lorsque j’ai ouvert le mail d’invitation, je me suis dit que j’allais enfin pouvoir partager ce que je ressens à des personnes, qui comprennent sûrement », confie Marine, violoniste. Même s’ils ont tous suivi une formation les dotant de compétences spécifiques pour intervenir de façon professionnelle dans les établissements de santé, « ces représentations nécessitent un haut niveau d’implication aux plans artistique, physique et humain. La parole est donc essentielle pour dédramatiser les difficultés », précise Liliane Tauru.
Expérimenter en questionnant les frontières
À l’hôpital, le premier contact est toujours le plus délicat. Marianne et Hnaweje commencent toujours par la phrase « Toc toc toc, est-ce qu’un petit morceau de musique vous ferait plaisir ? ». Le duo musical a pris le parti d’entrer sur la pointe des pieds pour ne pas déranger les patients. « Il y a toujours le stress de la rencontre avec l’autre. Au final, ouvrir la porte d’une chambre d’hôpital, c’est entrer chez quelqu’un, dans son intimité », poursuit Marianne. Les artistes observent et se renseignent discrètement auprès du personnel soignant, sur l’état général et la disponibilité du patient. Selon le climat émotionnel perceptible, ils improvisent en fonction du désir de ce dernier, sans ne jamais s’imposer. « J’essaie d’adapter mon répertoire, le niveau sonore, la tonalité, en fonction de l’expression que je perçois sur le visage », indique la viloniste Marine. Une écoute qui n’est pas toujours évidente selon les cas et les services visités, mais qui est nécessaire pour établir un lien avec le patient.
Une autre relation au public
« Intervenir en milieu hospitalier, c’est parfois difficile artistiquement », confie Laurence, car la démarche est inversée. L’artiste ne reçoit pas son public, mais va à la rencontre d’un public qui ne le connaît pas. « Sur scène, j’entends des applaudissements qui m’indiquent que le public a aimé ma prestation. À l’hôpital, c'est différent », explique Stéphane, guitariste. Des émotions parfois difficiles à gérer pour les artistes, et qui créent de la fatigue. Julie, conteuse, avoue ressortir de ses interventions « vidée », mais à la fois « nourrie d’une immense énergie, générée par ces rencontres incroyables ».
Le pouvoir de l’art dans les parcours de soin
Les questions de l’intention et de la signification des interventions artistiques à l’hôpital constituent un enjeu central. Depuis quelques années, de nombreuses études cliniques confirment l’impact réel et positif de l’art sur l’état général des patients. « À chaque séance, il y a cette espèce de magie qui laisse une trace positive », confirme Adrien, comédien. Au point que l’art agit parfois comme une stimulation sensorielle, et réussit à apaiser la douleur et l’anxiété pendant un acte de soin. « Je me rappelle de cette dame qui redoutait une prise de sang. Notre musique l’a apaisée et elle a accepté de laisser faire l’infirmière », confie Marianne. Liliane Tauru propose de conclure sur une citation, « Ne rien prévoir, tout en ayant tout prévu, car ici l’imprévu est la seule chose prévisible. L’artiste est à l’écoute, s’adapte, accepte, transforme, invente, crée, chaque rencontre comme si c’était la première. ». Ni thérapeutes, ni soignants, ces artistes au grand cœur proposent avant tout une expérience humaine, au pied du lit des patients.
Empreintes, le projet de la Nouvelle-Calédonie
Le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a souhaité appliquer au Médipôle de Koutio le principe du « 1 % artistique » qui consiste à promouvoir l’art contemporain dans les constructions publiques en consacrant un pourcentage (plafonné) du coût de la construction à la création et à l’installation d’œuvres. Le projet Empreintes - Arts & culture également initié par le gouvernement, met en œuvre la politique culturelle du centre hospitalier, à travers différentes actions dont l’accès à la bibliothèque, l’organisation de concerts, d’expositions temporaires, la projection de films locaux ainsi que l’intervention des artistes au pied du lit des patients. Ce dispositif propose tout au long de l’année, des actions pour faire vivre les espaces dédiés à la culture au Médipôle, grâce au concours du gouvernement et de partenaires tels que la Mission aux affaires culturelles du haut-commissariat de la République en Nouvelle-Calédonie, l'ADCK-centre culturel Tjibaou et des associations.
Musicothérapie au Médipôle
Depuis 2017, le Médipôle s’est engagé sur la voie de la musicothérapie en se dotant du programme Music Care, disponible sur tous les écrans multimédias qui équipent les lits de l’hôpital. Il donne accès à des playlists médicales créées spécialement pour un usage thérapeutique et apaisant. Elles contiennent, en plus de la relaxation, des compositions en lien avec l’univers musical du pays, créées dans le cadre du dispositif Empreintes - Arts & culture.