L'hommage au tirailleur Kalepo
Autorités civiles, militaires et coutumières étaient réunies le 10 novembre à Ko We Kara pour accueillir la dépouille du tirailleur kanak Kalepo Wabete, mort au front de la Grande Guerre. Un hommage qui s'est transformé en devoir de mémoire.
Après une cérémonie dans l'intimité familiale à La Tontouta, en présence de quelques officiels, de nombreuses personnes sont venues vendredi après-midi à Ko We Kara pour l'arrivée des restes mortels de Kalepo Wabete. Le cercueil, recouvert du drapeau bleu, blanc, rouge a été escorté jusqu'au grand faré, au son de chants drehu, par un détachement des Forces armées de Nouvelle-Calédonie. Parmi les militaires, une jeune fille originaire de Tiga porte la Croix de guerre dont a été décoré le tirailleur en septembre 1918 pour son courage au combat.
Mémoire commune
« Plus de 1 100 kanak se sont engagés lors de la Première guerre mondiale, un tiers ne sont pas revenus. Des millions de jeunes Européens sont partis eux aussi combattre pour la paix et un idéal », a rappelé le représentant de l'aire Djubéa-Kaponé dans son geste coutumier avant de céder la parole à la chefferie de Lössi, puis à celle de Tiga, l'île natale de Kalepo.
Est ensuite venu le tour des élus de saluer la mémoire du tirailleur tombé sur le champ de bataille de Vesle-et-Caumont, dans le Nord de la France, le 25 octobre 1918. Comme lui, 575 Calédoniens dont 382 kanak ne sont jamais revenus au pays. Le président du gouvernement Philippe Germain a conclu son discours sur ces mots : « Nous avons un devoir de mémoire, celui d'une mémoire commune, celle de nos morts (…) Les tirailleurs kanak et les engagés calédoniens se sont sacrifiés pour nous et nos enfants. Ne l'oublions pas ! ».
Œuvre de réconciliation
Pour Philippe Michel, président de la province Sud, le retour de Kalepo doit « participer à l’œuvre de réconciliation engagé il y a 30 ans autour de la poignée de main ». Le rapatriement du "vieux", tué dans la fleur de l'âge, a été pris en charge par l’État, grâce aux démarches engagées par la famille. L'événement a également reçu le soutien des institutions calédoniennes au premier rang desquelles le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie. « Il était juste que l’État accompagne son retour pour le rendre symboliquement aux siens et leur manifester sa gratitude pour son sacrifice. (…) Il était juste que son corps retrouve la chaleur de Tiga pour reposer, à l’ombre des pins colonnaires et des cocotiers, sur la terre de ses ancêtres », a souligné le Haut-commissaire Thierry Lataste évoquant ainsi la dernière étape du voyage de Kalepo Wabete : son inhumation, chez lui, le jour symbolique du 11 novembre.
L'atelier du centenaire du collège Baudoux
Le centenaire de la Première guerre mondiale se prépare activement au collège Baudoux à Nouméa. Dix-huit élèves de 5e participeront l'année prochaine aux commémorations du 11 novembre à Paris. En attendant, May, 13 ans, a eu l'honneur de lire à Ko We Kara le poème qu'elle a écrit après la rencontre entre les collégiens et une délégation de Tiga, menée par Jacques Wabete, descendant du tirailler Kalepo. En voici un extrait :
« Plus de trois millions d'hommes sont partis avec honneur,
Certains sont revenus remplis de terreur,
Ils se sont battus comme des héros, ont sacrifié leur jeunesse,
Et pour ceux qui y sont restés, ne laissent derrière eux plus que de la tristesse.
Nous, le projet Europe, nous n'oublierons jamais,
Que dans le passé, des gens ont péri, ont pleuré,
C'est pour cela que nous sommes présents aujourd'hui,
Pour rendre hommage à nos soldats sur leurs photos jaunies. »