Audience au collège Francis-Carco

Audience au collège Francis-Carco

14 décembre 2018

Éducation et formation

Madame le procureur s’adresse au présumé coupable qui n’en mène pas large.

Madame le procureur s’adresse au présumé coupable qui n’en mène pas large.

Une douzaine d’élèves de 4e du collège Francis-Carco à Koutio ont récemment donné une représentation d’un genre un peu particulier. Celle d'une audience au tribunal. Objectif, sensibiliser les enfants à la justice, et en faire des porte-parole auprès de leurs camarades de classe.

Présumé coupable, victime, avocats, procureur, juges, témoins, ils sont tous venus ce matin dans la salle du tribunal, dénouer l’imbroglio de l’affaire Bertrand. L’audience ne se situe pas au palais de justice de Nouméa, mais dans une salle de classe du collège Francis-Carco de Koutio. Une douzaine d’élèves se sont réparti les rôles. La pièce de théâtre dure une quinzaine de minutes…

À l’origine de cette représentation, la Brigade de prévention de la délinquance juvénile de la Nouvelle-Calédonie (BPDJ), créée en 2017. L’an dernier, elle a conduit un projet similaire avec une classe du collège de Boulari, mais, faute de temps, il n’a pu aboutir. Alors la brigade a relancé le dispositif à Francis-Carco. Le principe : sensibiliser les jeunes à la responsabilité pénale des mineurs, mais surtout leur faire visiter le tribunal correctionnel et assister à des audiences dès le premier trimestre. Toutes les classes de 4e s’y sont relayées, la justice faisant partie du programme scolaire.

Un film et une pièce de théâtre

 « Puis on a demandé des volontaires pour monter une pièce de théâtre », indique Audrey Rolly, professeur d’histoire-géographie et d’enseignement moral et civique (EMC). Une quinzaine d’enfants a spontanément répondu oui. « Des élèves assez extravertis, curieux, d’un bon niveau en général. » Tous sont régulièrement venus, sur leur temps de pause, les lundi et jeudi, depuis septembre. Deux heures par semaine, plus d’une vingtaine au total. Ils ont eux-mêmes écrit le scénario de la saynète, alors que six d’entre eux, aidés par la BPDJ pour le script et le vocabulaire technique, se lançaient dans le tournage d’une vidéo. Un film de 7 mn, qui montre le cambriolage, les constatations, la garde à vue, bref tout le déroulé d’une affaire judiciaire… jusqu’au jour du procès.

Connaître ses droits et ses devoirs

Ce matin-là donc, mercredi 5 décembre, la projection de la vidéo précède le jugement de l’affaire. La concrétisation d’un long travail, mené avec l’aide précieuse de l'infirmière scolaire Karina Lozach, notamment en matière de logistique et de costumes. Dans la salle du tribunal, le public est constitué de l’équipe de direction du collège, des enseignants investis dans le projet, des membres de la brigade renforcés par la présence du colonel Ollivier Bouisset, numéro 2 de la gendarmerie en Nouvelle-Calédonie, d’une représentante du vice-rectorat, et d’Hélène Iékawé. « Ce type d’action s’inscrit parfaitement dans le parcours civique scolaire, explique la membre du gouvernement en charge de l'enseignement. On veut former des citoyens éclairés, faut-il encore qu’ils connaissent le fonctionnement de la justice, leurs droits et leurs devoirs ».

Acteurs de prévention, pas spectateurs

« On apprend mieux en étant acteur, souligne Audrey Rolly qui a demandé aux quinze volontaires de se faire les messagers de tout ce que l’expérience leur aura permis d’assimiler, auprès de leurs camarades de classe. Les retours ont été très positifs, les gendarmes étaient étonnés du rendu ». Confirmation de l’adjudante Céline Cuvillier qui commande la BPDJ : « On a adoré ! Quand on voit ce genre de résultat après avoir longtemps travaillé avec des jeunes, c’est que du bonheur ! Une belle récompense ». Pour l’adjudante, l’objectif du projet est que « les enfants deviennent des acteurs de prévention, et non de simples spectateurs ». D’autant que « lorsque des jeunes voient d’autres jeunes réaliser des actes de prévention, le message passe mieux ». Plus efficace que les discours des adultes…

Changer le regard sur les gendarmes

Hélène Iékawé voit également dans ce type d’action la possibilité de « montrer que gendarmerie ne rime pas uniquement avec répression et que les gendarmes sont d’abord là pour protéger la population et lui apporter leur soutien », et donc de faire évoluer le regard porté par les jeunes sur les militaires en uniforme.

Prochaine étape, rejouer la pièce devant le procureur et la vice-procureur qui n’ont pu se libérer le 5 décembre. En début d’année prochaine peut-être. Et pourquoi pas à l’intérieur du vrai tribunal correctionnel ? Les avocats préparent déjà leur plus belle plaidoirie pour défendre ce nouveau projet…

 

 

 

 

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