En Belgique, pour une fois
Avec le concours du Centre Information Jeunesse (CIJ-NC), quatorze Calédoniens se sont envolés vers la Belgique dans le cadre du programme Erasmus+ Jeunesse & Sport. Une initiative en grande partie soutenue par le gouvernement, et qui, au-delà d’un échange classique, vise à faire prendre conscience à ces jeunes qu’on s’enrichit toujours de ses différences.
Ils sont quatorze âgés de 19 à 29 ans : huit filles et six garçons. Sept des Loyauté (trois de Maré, deux de Tiga, un d’Ouvéa et un de Lifou), quatre de Nouméa (Montravel) et trois de Dumbéa (Val Suzon et Dumbéa-sur-Mer). Certains ont un travail mais la plupart, sortis du système scolaire, sont sans emploi, parfois en formation d’animateurs. Leur point commun : l’envie de partager leurs savoirs et leurs savoir-faire. En compagnie de leurs deux accompagnatrices, Maïté et Andrea, ils se sont envolés ce jeudi soir pour un séjour de deux semaines en Belgique où ils seront accueillis par la quinzaine de jeunes venus l’an dernier en Calédonie (lire ci-dessous). « Je suis très heureuse d’avoir été choisie et de participer à cette grande aventure qui va me permettre de m’enrichir au contact de nouveaux horizons et de nouvelles cultures, et de partager des moments peut-être inoubliables », témoigne Joëlle (26 ans), de Dumbéa.
La bande des quatorze se rendra d’abord dans la ville maritime et moderne d’Ostende, en pays flamand, puis à Bastogne, commune rurale de Wallonie. « L’objectif de cet échange est de découvrir de nouveaux modes de vie, mais surtout de se confronter à l’interculturalité », explique Andrea Wamejonengo, chargée de mission mobilité au Centre Information Jeunesse de Nouvelle-Calédonie (CIJ-NC). Au programme d’un voyage rendu possible par l’agence Erasmus+ Jeunesse & Sport, le partage d’un large panel d’activités axées sur la culture et l’environnement.
Dépasser les préjugés et aller vers l’autre
Avant le grand départ, le groupe s’est retrouvé trois jours en internat au Centre des activités nautiques de la province Sud. Chacun a présenté les activités qu’il avait préparées – scrapbooking, bracelets de l’amitié à partir d’une pomme de touline (nœud marin), jeu de mémoire autour d’un diaporama sur la Calédonie, mise en scène de contes et légendes kanak, etc. Une intervenante de l’association France Volontaires a également proposé un topo sur la rencontre interculturelle qui a marqué les esprits. « Elle nous a dit qu’en changeant de pays et de culture, nous allions porter des jugements, que c’était inévitable, mais qu’il fallait dépasser ces premiers jugements », rapporte Clément 27 ans, animateur de proximité à la maison de quartier de Val Suzon. « On a tous des stéréotypes et des préjugés, qui font partie de nous, du contexte dans lequel on a grandi, qu’on a développés pour se mettre en sécurité, confirme Andrea. Mais il faut aller vers l’autre avant de le juger, essayer de le comprendre, et éviter ainsi le repli identitaire ».
Mesurer la chance de vivre au paradis
Aucune culture ne domine l’autre, c’est le sens du message transmis, et visiblement assimilé. Accompagnatrice de vie, Marie-Hélène (25 ans) fait partie de l’espace Montravel. « J’espère que ce voyage va me changer et m’ouvrir l’esprit », indique-t-elle. Clément, lui, entend « gagner en expérience et en maturité ». « J’ai besoin de changer d’air. On ne connaît que la Calédonie, si bien qu’on en oublie la chance qu’on a de vivre au paradis. »
« Cet échange a pour vocation de donner l’opportunité à des jeunes qui pour la plupart ne sont jamais sortis d’ici d’aller voir ailleurs comment ça se passe, résume Andrea. Ils apprécieront d’autant plus leur vie en rentrant. On a tout ici, quand on compare avec le Vanuatu ou Fidji par exemple. Il faut arrêter de se plaindre ! ».
Un an après
Il y a exactement un an, quinze jeunes Belges d’Ostende passaient deux semaines sur le Caillou. Au cours de ce long voyage de l’autre côté des océans, baptisé « The sound of C » – C comme Caledonia et, en phonétique, comme Sea, la mer –, ils avaient visité Nouméa – Sénat coutumier, centre culturel Tjibaou, etc. – et Dumbéa (ferme d'Erambéré, activités nautiques…). Avant de s’initier à la vie tribale et à la culture loyaltienne à Jozip (Lifou) : coutume, travail au champ, préparation du bougna, pêche, contes et légendes, vanilleraie, chants et danses, chasse au cochon sauvage… Les Calédoniens n’ont pas fait preuve d’une grande originalité en intitulant leur virée en Europe « The sound of B ». B comme Belgique. Et comme les quelque 2 500 bières brassées au plat pays ?
Financé à 90 % par le gouvernement
En avril 2015, le CIJ-NC a répondu et remporté (une enveloppe de 250 000 € sur trois ans) un appel à projets du Fonds d’expérimentation pour la jeunesse (dispositif État), afin de mettre en place la « Plate-forme de la mobilité internationale et européenne des jeunes Calédoniens ». L’objectif de ce dispositif est d’informer sur les possibilités de mobilité, de porter le Service volontaire océanien (SVO) conjointement avec la direction de la Jeunesse et des sports du gouvernement et France Volontaires, de former les acteurs de jeunesse (services provinciaux, maisons de quartier…), de préparer au départ tous les jeunes ayant échappé aux structures qui s’occupent déjà de mobilité (MIJ, vice-rectorat, chambres consulaires…) et de sensibiliser les élus. Le CIJ-NC est financé à près de 90 % par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie qui lui a accordé en 2017 une subvention de fonctionnement de 7,2 millions de francs, ainsi que 8 millions au titre de la mobilité, soit plus de 15 MF.