Sur le front du variant Delta en Polynésie

Sur le front du variant Delta en Polynésie

31 août 2021

Santé et social

À l’hôpital de Taaone, « la mort est omniprésente », décrivent les soignants calédoniens venus en appui des équipes polynésiennes (photos CHPF).

À l’hôpital de Taaone, « la mort est omniprésente », décrivent les soignants calédoniens venus en appui des équipes polynésiennes (photos CHPF).

Huit soignants de Nouvelle-Calédonie sont actuellement en renfort au Centre hospitalier de Polynésie française dans le cadre d’une mission d’aide sanitaire. L’équipe calédonienne livre ses impressions face aux ravages causés par le variant Delta. Et exhorte la population calédonienne à se faire vacciner pour se protéger et protéger les autres contre le Covid-19.  

Nos volontaires calédoniens s’attendaient à une mission difficile à l’hôpital de Taaone à Tahiti, submergé par les cas de Covid-19 dû au variant Delta. Dès leur arrivée, ils ont pu constater l’ampleur de la catastrophe et du drame humain vécu par les Polynésiens.  « J’ai 24 années de carrière comme infirmier et cadre de santé, 40 ans pour certains collègues, mais nous sommes tous marqués par la situation », écrit Mehdi Tamaloult. D’aucuns ont l’impression de mener « un véritable combat » et décrivent l’hôpital en « état de guerre sanitaire ». « Un mort en pousse un autre et ceux qui résistent sont bien mal, confie Françoise Belhomme. La "réa" ou plutôt les réas – car tous les services possibles ont été transformés – sont pleines », poursuit l’infirmière à la retraite. « La situation a continué à se dégrader au point de faire le tri de quel patient pourra continuer à vivre, faute de place et de matériel de réanimation », explique Pierre Dunand avec difficulté. Un choix inimaginable pour ce soignant et ses collègues.

 

« De vrais héros ! »

Aides-soignants ou infirmiers, dont certains spécialisés en réanimation, les personnels volontaire sont là pour « aider au mieux les équipes en place en fonction de leurs besoins, détaille Anne Le Callonnec. Les aides-soignants sont débordés. Les patients sont tellement dépendants de leur oxygène et fatigués qu’ils restent au lit tout le temps et demandent beaucoup de manipulations ». Un travail souvent éprouvant compensé par une délégation calédonienne soudée et des équipes polynésiennes « chaleureuses, souriantes et attentionnées », malgré la pression. « Ils sont dans l’urgence de la situation, ils gèrent et essayent comme nous tous de faire au mieux. De vrais héros ! », saluent les Calédoniens impressionnés par la solidarité et l’accueil polynésien, qui n’est plus une légende pour eux !

 

Les volontaires ont été accueillis par le ministre polynésien de la santé, Jacques Raynal, accompagné de Corinne Restzinieck, représentante du Centre hospitalier de Polynésie française.

Les volontaires ont été accueillis par le ministre polynésien de la santé, Jacques Raynal, accompagné de Corinne Restzinieck, représentante du Centre hospitalier de Polynésie française.

Se vacciner sans attendre

Une autre réalité a rattrapé l’hôpital de Taaone, celle de la faible couverture vaccinale face au virus. « Sur les 18 patients de mon service de réanimation Covid, aucun n’est vacciné », confie Pierre. Françoise confirme : « La majorité des malades sont non vaccinés et ce sont eux qui décèdent de façon très brutale. Des gens vaccinés sont aussi atteints, toutefois ils passent le cap, douloureusement pour certains, mais ne décèdent pas ». Pour les soignants, il n’est plus temps de douter de l’importance de la vaccination, « seul remède efficace même si ce nest pas à 100 % », tandis qu’ils craignent l’arrivée du variant en Nouvelle-Calédonie où la population n’est pas suffisamment protégée. « La Polynésie a déjà connu deux vagues de Covid avant nous. Une partie de la population a donc une immunité partielle, pas nous, alors que nous avons quasiment la même structure hospitalière et les mêmes types de patients avec comorbidités, s’alarme l’équipe calédonienne. Il faut compter six semaines pour un schéma vaccinal complet et une efficacité optimum du vaccin. Il est encore temps de se prémunir, sans attendre, puisque si le virus arrive, lui ne mettra pas six semaines à agir. Les chiffres du nombre de morts parlent d’eux-mêmes. Écoutons-les et vaccinons-nous ! » Au 30 août 2021, nos voisins polynésiens comptaient 423 personnes décédées du Covid-19, dont 277 décès, depuis le 26 juillet, avec l’explosion du variant Delta.

 

Un soutien salué par tous

La mission d’aide sanitaire calédonienne a été constituée à la suite d’une demande d’appui formulée par le président de la Polynésie française, Edouard Fritch, au président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, Louis Mapou. Ce dernier a immédiatement lancé un appel au volontariat. Face à la vague de solidarité exprimée, avec plus de 60 candidatures, une sélection a été effectuée sur les besoins précis exprimés par le Centre hospitalier de Polynésie française. Les huit volontaires ont pris leurs fonctions à l’hôpital de Taaone le 20 août, au lendemain de leur arrivée, pour une durée d’un mois.  Les services de la présidence du Fenua ont d’ores et déjà félicité l’équipe calédonienne, « dynamique, avec le cœur sur la main, pour son courage et son dévouement ». Les soignants ont salué, quant à eux, l’investissement du gouvernement calédonien dans ce projet solidaire et la confiance accordée à la délégation « pour cette mission dans laquelle nous nous sentons pleinement utiles ».

 

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