Les jeunes prennent la parole

Les jeunes prennent la parole

23 août 2018

Jeunesse et sports

Jeunes et moins jeunes ont mêlé leurs réflexions et leurs propositions concrètes.

Jeunes et moins jeunes ont mêlé leurs réflexions et leurs propositions concrètes.

Plus de 250 personnes ont participé, samedi 18 août, aux États généraux de la jeunesse, à Bourail. Une étape importante dans la construction du futur plan jeunesse de la Nouvelle-Calédonie. Les jeunes et leurs aînés sont venus en nombre pour échanger et proposer des pistes d’action.

 

Ciel limpide, lagon cristallin, les États généraux de la jeunesse ont trouvé au centre d’accueil de Poé, samedi 18 août, un cadre propice à la réflexion. Cette journée de paroles, d’échanges et de co-construction se voulait le point d’orgue des rencontres menées ces derniers mois sur tout le territoire. Une vingtaine d’ateliers préparatoires, à Nouméa, Dumbéa, La Foa, Poya, Koné, Kaala-Gomen, Ponérihouen, Maré, Lifou et Ouvéa, avaient permis à plus de 300 personnes de réfléchir sur la jeunesse, de formuler des constats, d’esquisser des pistes d’action. Ces travaux ont formé la première pierre de la grande réflexion commune de ce 18 août, pour « faire émerger une parole collective », a déclaré en ouverture Christophe Chalier, conseiller jeunesse à la direction de la Jeunesse et des sports de la Nouvelle-Calédonie, référent pour les États généraux et le futur plan jeunesse.

« Des jeunes qui ont de la valeur »

Cette parole, les jeunes s’en sont saisis avec enthousiasme. Dans les groupes de travail qui les ont occupés toute la journée, mais aussi lors de témoignages que quelques-uns ont livré aux participants rassemblés sous le chapiteau, avant le démarrage des ateliers.

« Pendant mon service civique, j’ai côtoyé des jeunes qui n’ont pas forcément de diplôme ou d’emploi mais qui ont de la valeur et des capacités, ils avaient de bonnes idées. Alors, avec un petit groupe, j’ai décidé de créer une association pour valoriser la jeunesse », a témoigné Océane. Première à prendre la parole, elle a résumé l’esprit de cette journée voulue par Valentine Eurisouké, membre du gouvernement chargée de la santé, de la jeunesse et des sports  : permettre à la centaine de jeunes de tout le pays réunis ce jour, au côté de responsables institutionnels, associatifs ou coutumiers, de faire passer leurs messages, leurs idées, leurs projets pour la jeunesse du pays.

Des témoignages ont ponctué la journée.

Des témoignages ont ponctué la journée.

 

« Ayez confiance en vous-même »

« Nous les jeunes, on est capables de beaucoup de choses », a enchaîné Kalolo, 16 ans, engagée dans le Conseil des jeunes de Dumbéa « Je suis née comme garçon mais je parle de moi au féminin. J’aime être moi-même », a-t-elle revendiqué, défendant le droit à la différence. Pour Edouard qui, après un parcours non choisi, a fini par trouver sa voie et sa « ferveur » à l’université, l’engagement commence par le respect de soi-même et des autres : « Je ne peux pas développer un pays si moi-même, je ne suis pas développé à l’intérieur de moi, dans mon cœur ; et si nous voulons nous respecter nous-mêmes, il faut s’ouvrir aux autres. » Lui a emprunté le chemin de la foi mais son message s’adresse à tous : « Ayez confiance en vous-mêmes, alors vous pourrez imposer quelque chose pour l’avenir du pays ! »

« Respect, partage et humilité »

Trois membres des Yamak Pacifique ont eux aussi partagé leur vécu. « Suivre la bande, aller voler, taper des petits… c’est ce que je faisais, a raconté Noël, 21 ans. Et puis j’ai appris des valeurs : respect, partage et humilité, les valeurs de Yamak Pacifique. Ces valeurs, c’est ça que représente la Nouvelle-Calédonie. » Engagé aussi dans le mouvement Zéro Tolérance, il encourage : « La jeunesse, levez-vous ! » Pour Gaby, l’important est de « se trouver un but », et Chris rappelle : « Ici dans ce pays, il n’y a pas que des jeunes qui font des bêtises, nous on est des jeunes qui s’ouvrent à tout le monde. »

« La jeunesse, c’est le présent ! »

Thibaut Bizien, de Caledoclean, a parlé de la naissance de l’association : « On a commencé comme cinq couillons à ramasser des cannettes, et aujourd’hui on a nettoyé plus de 300 tonnes de déchets sur toute la province Sud. On va à la rencontre du pays, on crée du lien social, ça nous a rendus beaucoup plus riches. Le respect, l’humilité, devant les déchets, là tu l’apprends, c’est concret. » Rejoignant le constat d’Océane et des autres témoins : « cette richesse humaine, on a besoin de la mettre plus en avant. » Et sa conclusion était une bonne transition avant le démarrage des ateliers : « On dit toujours que la jeunesse, c’est l’avenir, mais la jeunesse, c’est le présent ! Elle représente 50% de la population ! On a besoin de construire une société où tout le monde peut se reconnaître. »

Les participants se sont rapprochés par petits groupes pour faire circuler la parole, structurer les idées, faire des propositions…

Les participants se sont rapprochés par petits groupes pour faire circuler la parole, structurer les idées, faire des propositions…

 

Cinq thématiques d’échanges

Sous le grand chapiteau, les 200 chaises rassemblées n’ont pas suffi, il a fallu en rajouter. Dix groupes d’environ 25 personnes se sont constitués. Cinq thématiques d’échanges, issues des ateliers préparatoires menés depuis fin mai, ont été proposées à la réflexion sous forme de questions affichées sur de grands panneaux blancs : « Quelle devrait être la place de la jeunesse dans l’espace public, la société calédonienne ? » ; « Qu’est-ce qui contribue favorablement à l’épanouissement de la jeunesse ? » ; « A quoi ressemble une jeunesse utile à la société ? » ; « A quoi ressemble un réseau qui favorise les initiatives ? » ; « Qu’attend la jeunesse des politiques publiques qui lui sont destinées ? »

« Des jeunes et des plus âgés »

Dans chacun des dix ateliers, un animateur assurait la fluidité du débat et l’interactivité, et guidait les participants pour leur permettre, en sous-groupes de cinq ou six, carnet à la main, de faire émerger un diagnostic partagé. Une organisation en apparence complexe qui a d’abord surpris, mais au final très efficace et constructive. « Je ne m’attendais pas du tout à ça, témoigne une jeune femme à l’issue de la matinée de travail. Mais ça a bien marché. Il y avait des jeunes et des plus âgés et tout le monde a pu faire des propositions, s’entraider aussi à formuler ou à comprendre les questions… » Les tableaux blancs se sont peu à peu couverts de mots, d’idées classées par thèmes… Un brainstorming géant, mené par des forces vives prenant leur rôle très au sérieux. Jusqu’à midi passé, la pensée plurielle a été formulée, synthétisée, transcrite.

4  Les dix tableaux se sont peu à peu couverts d’idées à transformer en propositions concrètes.

Les dix tableaux se sont peu à peu couverts d’idées à transformer en propositions concrètes.

 

« Une vision à long terme »

La pause déjeuner a permis de reprendre des forces et d’échanger ses impressions. Pour l’un, « ce mélange d’hommes, de femmes, de classes sociales, d’âges, de la société civile et des institutions, ça permet des échanges différents, car il y a plusieurs réalités dans ce pays ; tout le monde apporte sa pierre. » « C’était très riche, dit une autre. Ce sont des espaces dont on a besoin pour échanger. » Pour ce jeune quadra, « l’important, c’est d’avoir une vision à long terme et de former la jeunesse à être de grands rêveurs ! » Plus pragmatique, ce représentant d’association appelle à « créer des ambassadeurs pour faire tourner des réseaux d’acteurs ».

« Donnez-vous le courage de réussir ! »

Avant d’aborder les propositions d’actions dans les ateliers de l’après-midi, des jeunes ont encore témoigné en public. Comme Emma, dont la communauté « aide les jeunes à considérer la vie sous un autre angle » – « les jeunes ont plein de capacités, il faut les aider à les discerner. » Ou ce détenu en permission, qui « en prison en métropole a pu suivre deux formations, en ébénisterie et sculpture, et obtenir un CAP ; maintenant je peux mieux voir mon avenir. » Et d’adresser ce message à la jeunesse, très applaudi : « Croyez en vous ! Donnez-vous le courage de réussir ! » Sari a, lui, partagé sa « vision d’un futur durable » où « le développement personnel » serait intégré aux programmes scolaires « au même titre que le français ou les maths ».

Des propositions très concrètes

Au terme de cette longue journée, dont se sont imprégnées les deux membres du gouvernement particulièrement concernées, Hélène Iékawé, chargée de l’enseignement, et Valentine Eurisouké, des propositions très concrètes ont été formulées dans chacune des cinq thématiques proposées. Création d’un Conseil des jeunes, des voix dans les institutions provinciales ou au Sénat coutumier, une médaille du mérite valorisant les jeunes, des temps d’engagement bénévole aménagés dans les rythmes scolaires… les idées n’ont pas manqué. Pour Christophe Chalier, chargé de les « mettre en musique », la prochaine étape consiste en « la formulation d’un pré-projet de stratégie politique, qui fera l’objet d’un processus de validation », avant la présentation du plan au Congrès. Une restitution de ces États généraux de la jeunesse sera proposée dans les dix communes qui ont participé à leur préparation.

 

 

 

 

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